Monday, September 12, 2011

Nepal - interview avec Biplad du PCUnmaoiste qui explique la lutte entre deux ligne dans le parti

Biplab : « Même si nous ne pouvons pas continuer tous ensemble, rien n'arrêtera la prochaine révolution »

Une traduction spécialement dédicacée aux ultragauchistes qui considèrent qu'il n'y a pas de ligne rouge au Népal... et que ceux qui "fantasmeraient" là-dessus, c'est à dire ceux qui pratiquent l'internationalisme prolétarien, contrairement à eux, ne feraient que "s'approprier le prestige" ( !) du maoïsme au Népal et maintenant en Inde (et seraient au passage des "cosmopolites" !!!). Car il faut bien comprendre ce qu'il y a derrière cette position : les opportunistes de droite népalais ayant l'appui de l'expansionnisme indien, voire du projet impérialiste chinois, et de toute la Réaction mondiale qui salue leur "engagement dans le processus de paix" ; la ligne rouge, sans la solidarité internationaliste, MOURRA et la révolution népalaise avec elle. En niant qu'elle existe, et donc en ne la soutenant (par définition) pas, les ultragauchistes se font encore une fois les zélés serviteurs du système impérialiste mondial, en accélérant la liquidation de la première révolution issue d'une Guerre populaire victorieuse depuis 1975. Ces manœuvres au service de la Réaction mondiale doivent être dénoncées par tous les vrais révolutionnaires internationalistes, impitoyablement, et tou-te-s ceux et celles qui ont étudié l'histoire du mouvement communiste international, savent ce qu'elles mériteront le moment venu.

Elle est parue tout d’abord sur le site Winter Has Its End (WHIE).

WHIE : Des divergences très importantes ont émergé dans votre Parti sur l'intégration de l'Armée. Pourriez-vous nous expliquer ceci ?

BIPLAB : Nous avons une lutte entre deux lignes en cours, dans notre Parti, sur la question de l'intégration de l'Armée populaire de libération (PLA). Cette lutte a été principalement ciblée sur Baburam Bhattarai, mais en ce moment elle s’est concentrée sur Prachanda. Prachanda affirme que nous pouvons aller de l’avant en acceptant les propositions d'intégration des forces réactionnaires au Népal.

Ils sont prêts à dissoudre, et non à intégrer l'Armée de libération du Peuple, qui a combattu pendant 12 années, dans l'armée du Népal.

Il est étonnant que l'armée du Népal ait formulé la proposition au sujet de l'intégration. Leur proposition leur offre la direction et désintègre l'Armée populaire de libération sous celle-ci. La PLA n’est pas traité comme des soldats de l’armée du Népal. La proposition suggère que la PLA soit mise de côté dans des bureaux locaux, ou devienne des gardes forestiers sans armes. Prachanda accepte leur proposition.

En ce moment, les armes de la PLA sont confinées dans des containers. Les partis du Congrès népalais et de l'UML [les partis corrompus pro-Indiens et de statu quo] exigent que ces armes soient détruites, et Prachanda sympathise avec eux.

Ils veulent diviser la PLA en deux factions où la plupart des personnes seront renvoyées à la maison, et un petit nombre seront intégrés. Nous n'accepterons pas ce plan.

Nous pensons que la ligne que Prachanda a prise est du révisionnisme de droite. Elle liquidera nos forces et armée. Elle mettra fin à la révolution. Nous ne l'acceptons pas.

Pour intégrer la PLA, deux choses doivent être consolidées :

- La majorité de la PLA doit être intégrée.
- La PLA doit diriger ses propres unités, et la PLA doit prendre des postes de direction dans l'Armée.

Nous voulons des unités libres et l'intégration collective. Ils refusent ces choses, et la lutte porte sur ces points.

WHIE : Précédemment, vous avez parlé de la réunion de Palungtar en octobre 2010. Pouvez-vous expliquer ce qu'était la réunion de Palungtar, et vos vues là-dessus ? Comment les choses se sont-elles développées dans votre Parti depuis Palungtar ?

BIPLAB : Palungtar était une très grande réunion de masse de notre Parti. Dans cette réunion, trois positions ont été présentées, mais en réalité il n'y avait que deux lignes.

Nous avons argué du fait que nous n'avons aucune autre option devant nous que de lancer l'insurrection du Peuple. Le Président Prachanda a argué du fait que l'insurrection est importante, mais nous ne pouvons pas mettre fin au processus de paix. Baburam Bhattarai nous a rétorqués qu'il faut rechercher le compromis avec les autres partis, et que l'insurrection n'est pas possible (pour le moment NDLR). Par conséquent, nous devons réaliser nos buts par de futurs amendements légaux.

Après six jours de discussion, nous avons tiré une conclusion en trois points :

- Il n'y a aucune alternative à l'insurrection populaire.
- Il n'y a aucune alternative à unifier le Parti.
- Il n'y a aucune alternative à transformer ce Parti. Le Parti a été détérioré et nous devons le rectifier. L'esprit révolutionnaire et les révolutionnaires doivent diriger le Parti.

Malheureusement, Prachanda a laissé sa ligne au centre. La ligne de Prachanda n'a pas mis en pratique ces décisions.

Dans son document plus récent, Prachanda n'a même pas inclus l'insurrection en mot. Même Baburam Bhattarai pense que le dernier document de Prachanda est révisionniste de droite [rires]. Prachanda a fait des excuses à Bhattarai et dit qu'il avait peur d'être trop provocateur envers Bhattarai. Mais Bhattarai [rire], la droite de notre Parti, essayait d'obtenir de Prachanda de garder ce point. C'est assez étonnant. [NDLR : la jouer "de gauche" de temps en temps, lorsque l'on vise la direction suprême, c'est aussi cela le trotskysme ! ]

Après 23 ans à nous diriger, pour la première fois, Prachanda a perdu son leadership parmi nous. Les révisionnistes de droite vacillent dans notre Parti. Dans un avenir proche, nous voulons une réforme importante de notre Parti.

Ce conflit peut être utilisé par les partis réactionnaires du Congrès népalais et de l'UML. La plupart des réactionnaires ont félicité Prachanda, et demandé aux gens d'approuver sa ligne. Ils n'accompliront pas leur rêve...

Cette lutte de lignes continuera pendant toute la révolution, mais jour après jour les chances de Prachanda de pouvoir conduire la révolution continuent à diminuer. Si le Parti peut être réformé, nous avancerons ensemble. Mais même si nous ne pouvons pas continuer ensemble, rien n'arrêtera la prochaine révolution du Peuple népalais.

WHIE : Comment évaluez-vous les tentatives de Baburam Bhattarai de devenir Premier ministre ?

BIPLAB : Nous livrons un type extraordinaire de lutte en ce moment. Bhattarai veut la direction du gouvernement, mais ne veut pas la révolution. Nous voulons la révolution, ainsi nous essayons de développer des manières d'aller au-delà des fissures entre Prachanda et Bhattarai. Nous avons discuté s'il était meilleur que Bhattarai ou Prachanda soit le Premier ministre, et tous les deux luttent pour cette position. En dernière analyse, nous (avons conclu que nous) avons la direction du Parti, et que si nous ne décidions pas, alors ni l'un ni l'autre ne peuvent devenir Premier ministre.

En réalité, les deux lignes sont très semblables. Nous pensons que lutter contre Prachanda est encore plus dur que lutter contre Bhattarai. C'est pourquoi nous avons soutenu Bhattarai pour devenir Premier ministre.
Nous constatons que les réactionnaires disent qu'ils soutiendront Baburam Bhattarai si nous l'envoyons pour l'élection. Mais si nous le proposons, soudainement ils soutiennent Prachanda. C'est intéressant, mais cela ne doit pas interférer (dans nos discussions).

Si Prachanda ou Bhattarai deviennent Premier ministre, cela n'importera réellement pas beaucoup. C'est le Peuple qui doit diriger la société népalaise.

Nous pensons que la vérité est que la Constituante (CA) ne va pas être dissoute pour de bon. Les analystes politiques lancent des avertissements contre l'anarchie et la dissolution de la CA… Ce n'est pas la réalité.

Les puissances étrangères et réactionnaires vont plutôt attendre trois mois une Constitution de compromis [plutôt qu'une nouvelle Constitution démocratique révolutionnaire préconisée par Biplab et Kiran], et utilisent cette période de transition pour casser l'esprit révolutionnaire des masses populaires. En dernière analyse, leur tactique est correcte. Elle ne mènera à rien de bon.

Nous n'accepterons pas une Constitution de compromis. Soit nous avons besoin d'une Constitution du Peuple, soit nous avons besoin d'une révolution.

La teneur principale de la lutte de lignes entre nous, d'une part, et Bhattarai et Prachanda d'autre part, c'est qu'ils pensent que la révolution peut être faite dans la superstructure. Cette lutte de lignes arrivera à sa conclusion. Il est impossible de faire la révolution à partir de la superstructure, dans notre conception (du monde et de la stratégie révolutionnaire NDLR).


Pour faire la révolution, nous devons mobiliser tous les facteurs révolutionnaires, pour ne pas compter sur les facteurs bourgeois.



le commentaire du blog maoiste francais 'servir le peuple'

Il ressort bien, de cette interview, que Biplab représente la ligne la plus révolutionnaire dans la gauche du Parti maoïste au Népal. Jeune, Biplab montre que l'avenir de la révolution populaire démocratique au Népal est assuré : il y aura toujours suffisamment de cadres révolutionnaires pour apporter leur expérience de lutte et d'organisation aux masses populaires qui, ne l'oublions pas, SONT LES VRAIS COMMUNISTES. Voilà qui montre totalement le RIDICULE des gens qui affirment qu'il n'existe pas de ligne rouge dans ce Parti. Ces gens ne sont de toute manière pas maoïstes (puisqu'il nient la lutte de lignes et même l'existence de lignes dans le Parti népalais comme dans toute formation organisée du prolétariat). Comme SLP l'a expliqué dans un précédent article, et comme le montre leur mise en avant délirante d'un Staline qui n'a rien à voir avec la réalité historique, ce gens (ayant compris que la révolution viendra inévitablement) sont seulement là pour en être les cadres "éclairés" et conserver leur "importance" de petits bourgeois dans la situation révolutionnaire, puis la société socialiste. Face à eux, la ligne du prolétariat révolutionnaire est simple, elle est de les combattre impitoyablement ; comme le prolétariat népalais combat Prachanda et Bhattarai, qui ne sont finalement rien d'autre, mais en version opportuniste et collaboration de classe.

Au contraire, le maoïsme nous enseigne qu'on peut le nier tant qu'on veut (comme le faisaient Staline et les ML de son époque), les tendances, les lignes existent qu'on le veuille ou non dans tout Parti révolutionnaire ; et que leur lutte est même un aspect essentiel du processus de lutte révolutionnaire pour la conquête du pouvoir, puis de construction de la nouvelle société. Le Parti représente le camp politique du prolétariat face au camp politique bourgeois ; il est uni dans l'action car le camp bourgeois, au delà de son grand nombre apparent de "partis", est uni (derrière l'Etat, les institutions capitalistes, les forces armées) ; mais les divergences en son sein (il suffit de voir le Népal, ou la Chine du temps de Mao) peuvent être aussi grandes que dans le camp politique bourgeois (et l'affrontement des positions, pour la victoire de la ligne révolutionnaire, est un aspect de la dictature démocratique du prolétariat). C'est d'ailleurs un facteur objectif, indépendant de toute volonté, que quand on s'approche de la conquête du pouvoir, et a fortiori face aux défis immenses après celle-ci, la gauche et la droite se renforcent dans le Parti et l'écart entre elles se creuse ; alors que quand l'objectif est encore lointain, l'ennemi de classe encore puissant et structuré, la tendance à l'unité du Parti est plus forte (c'était le cas au Népal jusqu'en 2005). Quand émerge une ligne opportuniste de droite, rien ne sert donc de s'exciter comme une puce, de s'étrangler de rage : il faut simplement la combattre, posément mais fermement, armé du "capital" de 160 ans d'expériences révolutionnaires...

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